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lundi 29 juillet 2013

Jules César/ Antoine et Cléopâtre - W. Shakespeare

J'avais prévu une lecture Shakespearienne pour le mois anglais, mais, à l'époque je n'avais trouvé que des traductions de François -Victor Hugo. Je ne mens pas, le recueil que j'avais trouvé contenait trois pièces dont le Marchand de Venise, et je n'avais pas vu le nom du traducteur. Et après avoir vainement essayé de lire chaque pièce, j'ai vérifié, et Damned!
Pourquoi tant de haines? paaaarce que! Parce que tout simplement je trouve les traductions du fifils à papa absolument indigestes au point de me faire relire plusieurs fois les premières pages sans y rien comprendre. Je le disais déjà , sans compter que je n'ai jamais publié mon billet ABC 2010 sur Macbeth, parce que je suis une fois de plus tombée sur une de ses traductions et que je n'ai rien compris ( si ce n'est qu'il fait du mot à mot.. mais vraiment du mot à mot du genre "To make a fool out of somebody "n'a jamais voulu dire " faire le fou de quelqu'un".. j'en pleurerais tiens..)

Et donc, j'ai fais la tournée des bouquinistes et ai trouvé une édition que je ne connaissais pas " bibliothèque de Cluny", une collection Armand colin des années 50
Et après avoir vérifié que le texte est lisible, j'ai eu la joire de voir dans la préface " comme la plupart des traducteurs[..] nous avons utilisé au départ la traduction de F-V Hugo. [...] Pourtant, elle donnait prise aux critiques par des erreurs caractérises, des lourdeurs, des expressions maladroites ou équivoques". Donc en gros, c'est une base mais tellement grossière qu'on l'a entièrement remaniée. Joie et bonheur!


Donc en ce qui concerne la traduction finale, je ne sais pas exactement de qui elle est les éditeurs des années 50 ne s'embêtaient pas à citer leurs traducteurs. Mais elle est lisible: pas d'énormes boulettes qui laissent transparaître un anglicisme évident.

Donc pièce 1: Jules César. Et surprise, le grand Jules n'apparaît que très peu, l'argument est plutôt autour de la conspiration des Ides de Mars et de ce qui s'ensuit ( Jules César est assassiné dès le III° acte, et on l'a peu vu auparavant). Le personnage central est Brutus et ses hésitations à prendre part à la conspiration, un peu comme Hamlet, sauf que Brutus se décide à agir beaucoup plus vite, et sur des motifs on va dire fallacieux ( César n'est pas mauvais, mais il risque de le devenir, donc autant couper court). Cassius, l'autre principal conspirateur, le moteur même de la conspiration est lui beaucoup plus intéressé par le pouvoir. J'ai beaucoup apprécié le fait qu'un des thèmes centraux soit l'amitié, et surtout la destruction d'une amitié. Cassius fait appel à l'amitié que Brutus  a pour lui pour l'embobiner - il n'y a pas d'autre mot- dans son projet d'assassinat. De fait ils deviennent complices avant tout, et les dissensions éclatent entre eux. Ils sont obligés de se faire bonne figure car ils sont tous deux dans la même barque, mais le coeur n'y est plus.
en face, un autre duo: Marc-Antoine, orateur et manipulateur de talent bien qu'il s'en défende ( j'adore la manière dont il retourne la foule à leur avantage en ayant l'air de respecter les conspirateurs, grand moment) et Octave , le futur auguste, bien décidés à venger César. Mais là aussi, leur duo est un duo de circonstance pour atteindre un même but, et l'hostilité entre le chef militaire aguerri et le jeunot futur empereur, qui éclatera dans la pièce suivante est déjà latente. Tout ça est passionnant, parce que très politique, et finalement pas si éloigné de ce que j'avais pu apprendre en cours de latin. un pièce de tacticiens en fait, je convient que ça peut rebuter les gens qui attendent du romanesque, mais j'ai bien aimé.

Et bien ri aussi. Ca c'est la faute aux conventions théâtrales de l'époque qui paraissent terriblement kitsch aujourd'hui. La propension des personnages à se suicider pour un rien après une grande tirade bien léchée ( après vérification Porcia s'est bien suicidée en mangeant des braises - ce qui doit être le suicide le plus bizarre de l'Histoire ou peu s'en faut- mais après seulement la mort de son mari, ce qui est moins tiré par les cheveux que de se suicider parce qu'il est parti en campagne militaire.. comme tout romain).
 Et cette propension à mourir en scène. Le théâtre classique français ne représentait pas la mort sur scène, et ce n'était parfois pas un mal, parce qu'il y a possibilité de faire dire à un personnage " il s'est passé une épée au travers du corps, il a agonisé pendant es heures dans une mare de sang".. c'est glauque mais.. là non, on a un comique involontaire de répétions grâce aux didascalies: il se jette sur son épée et meurt. Il est poignardé et meurt. Le problème est le même dans Cléopâtre: Le serpent la mord et elle meurt, la servante tombe raide morte..j'ai l'impression que tout le monde bien portant une seconde avant décède instantanément, et finalement très proprement. Il n'y a finalement que la mort d'Antoine qui dure un peu plus et donc paraît un peu plus réelle.. bien que le passage où on le hisse mourant par une fenêtre manque sérieusement de dignité..
autre problème: les anachronismes. Parce que des romains qui parlent d'enfer, de démons, de jugement dernier, ou entendent sonner une horloge, et cachent des poignards dans leurs pourpoints...De même qu'il est question à un moment d'utiliser une pertuisane ( une sorte de hallebarde). Les romains utilisaient des lances certes, mais là.. Ca m'a faite rire autant que s'il avait été mentionné un mousquet ou une arquebuse. Enfin je suppose que les spectateurs de l'époque s'en fichaient et qu'un romain en robe de chambre ne leur posait pas de souci particulier, qu'il en leur venait pas à l'idée que les choses aient même pu être autrement que ce qu'il voyaient au quotidien. Mais moi, ça me fait marrer. désolée William, je sais que ça n'était pas le but.
juste pour le plaisir, le buste retrouvé il y a quelques années dans le Rhône, et assimilé à César. Simplement parce que c'est une oeuvre d'une qualité extraordinaire, indépendamment de l'identité du personnage, et qui dégage vraiment une impression  saisissante lorsqu'on la voit "en vrai".

Pièce 2: Antoine et Cléopâtre. On retrouve  d'un côté Antoine, qui oublie tout ses devoirs de triumvir à la cour de la reine Cléopâtre, et d'un autre Octave, qui essaye de lui rappeler justement, face à la menace que constitue Sextus Pompée, fils de Pompée le grand, bien décidé à se faire un nom dans cette période troublée. Mais Antoine n'en fait qu'à sa tête, tout manipulé qu'il est par Cléopâtre.
J'ai moins aimé que Jules César, bien que la pièce soit plus connue. On retrouve les soucis que je mentionnais plus haut , les anachronismes , bien qu'il y en ait moins, les personnages qui meurent en une fractiuon de seconde.. Mais le principal problème pour moi vient de Cléopâtre. On la suit dans les dernières années de sa vie, ça n'est plus une adolescente ( la Cléopâtre historique est morte avait en gros 40 ans à sa mort)n, et c'est avant tout un chef d'état. or cette dimension de reine est complètement mise de côté au profit d'un comportement mi gamine capricieuse,  mi mégère non apprivoisée. Et c'est bien dommage, parce que certaines répliques laissent à penser qu'il y a une grande part de calcul dans ses geignements pour obtenir d'Antoine  l'appui dont elle besoin face à Octave. Mais non, elle continue à se comporter en casse-pied capricieuse ( qui moleste un messager parce qu'il nui lui apporte pas les nouvelles qu'elle voudrait entendre) les trois-quart du temps. Et c'est bien dommage, car cette Cléopâtre qui manque singulièrement de dignité me gâche une partie du plaisir. On a bien du mal à voir en elle un personnage qui puisse fasciner tout le monde. Faire peut à cause de ses sautes d'humeur, à la limite, mais fasciner, assez peu. Je suppose que Shakespeare a voulu mettre en avant qu'une reine est une femme avant tout, mais ça ne colle pas avec le fait de mettre en avant son sens tactique et son intelligence. Là elle fait juste casse- pied capricieuse. J'aurais préféré que la pièce joue justement sur les deux tableaux: la différence entre Cléopâtre dans le privé - plus soupe au lait, plus caractérielle, si on veut, et la Reine. C'est dommage , car elle aurait pu être un bon personnage, si elle avait un peu plus de nuances.
Je sais on va me dire " la plus grande histoire d'amour de tous les temps" (argumentaire du film de 1963), mais justement, j'ai du mal à y croire, ayant déjà lu chez le même auteur des portraits plus subtils, je sais qu'il peut le faire. Et c'est rageant de voir qu'il passe à côté.Après ça n'est que mon ressenti..
Théâtre, festival, tout ça...
un empereur et une reine...
...et là, on ne peut plus historiques!
Joie, une nouvelle lecture pour le Gilmore challenge. dommage je ne trouve pas de gif Jules César
Shakespeare étant contemporain du début de l'empire britannique, ça compte!
parce que Antoine et Cléopâtre
Parce que César, Antoine, Octave, Brutus, etc..

dimanche 28 juillet 2013

Cyrano de Bergerac - Edmond Rostand

et hop, 2° lecture théâtrale de ce festival.
en l'occurrence une relecture puisque j'avais déjà lu Cyrano il y a pas mal d'années. Lue et appréciée. Et la relecture confirme ce que j'en avais pensé à l'époque.
Détail drôle, cette édition est illustrée d'une photo de Jacques Weber dans le rôle-titre au théâtre, qui jouait le comte de Guiche dans le film de Rappeneau

C'est brillant, plus que brillant même, une réputation amplement méritée. Tant au niveau de l'action, menée tambour battant, des personnages hauts en couleur, de l'écritue.
On est  dans le pastiche de théâtre classique, en alexandrins, tout en le dynamitant: unité de lieu? on s'en fiche. unité de temps? puis quoi encore, l'action s'étale sur 15 ans. unité d'action: ça part dans tous les sens. Et j'adore ça.
Les alexandrins sont littéralement pulvérisés, émiettés entre plusieurs personnages; le théâtre classique tourné gentiment dérision dès le début du premier acte, foisonnant de personnages,qui nous montre une représentation telle qu'au XVII° siècle: on rit, on se bat à l'épée, on joue aux dés, on picole, on vient se faire admirer, mais on s'intéresse finalement peu à la pièce quand un spectacle bien plus intéressant se passe dans la salle.

Et les morceaux de bravoure qui s'enchaînent sans qu'on puisse vraiment en choisir un.
L'évolution des personnages du début à la fin de la pièce est une bonne surprise qui donne de la crédibilité à l'ensemble: Cyrano d'abord, qui n'est pas monolithique. Parfois agaçant dans ses fanfaronnades ( il y a des moments où je le claquerais volontiers, à cause de sa fixette: j'ai un grand nez, donc je suis moche, donc tout le monde me déteste alors que ses amis lui soulignent que "non, tiens , regarde, tu as impressionné l'ouvreuse du théâtre, profite de l'occasion"-sisi, ça n'est pas dit comme ça, mais c'est l'idée-  n'importe, il s'enferre dans son complexe). Mais souvent drôle, et de plus, il révèle une vraie profondeur, certes lorsqu'il passe son curieux marché avec Christian pour séduire Roxane à eux deux, mais aussi lorsqu'il démontre son sens de l'amitié envers Le Bret, envers Ragueneau, envers la "communauté" des cadets de Gascogne. Ou, dans le passage que j'adore, lorsqu'il refuse une offre en or de Richelieu afin de garder son indépendance:

 Sois satisfait des fleurs, des fruits, même des feuilles,
Si c'est dans ton jardin à toi que tu les cueilles!
Puis, s'il advient d'un peu triompher, par hasard,
Ne pas être obligé d'en rien rendre à César,
Vis-à-vis de soi-même en garder le mérite,
Bref, dédaignant d'être le lierre parasite,
Lors même qu'on n'est pas le chêne ou le tilleul,
Ne pas monter bien haut, peut-être, mais tout seul ! 

 Pour moi, toute la pièce et tout Cyrano est là, dans ce passage. En tout cas, c'est un personnage riche et je conçoit qu'il puise être un véritable défi pour un acteur: arriver à la fois à rendre cette volonté de lutter contre les masques imposés par les mondanités, tout en se cachant derrière quelqu'un d'autre, et ce sans que l'une ou l'autre de ces facettes ne sonne faux.

En face il y a Roxane, j'avais presque oublié à quel point son évolution fait plaisir: on croit au début avoir affaire à une mondaine évaporée qui ne s'intéresse qu'à l'esthétique et au beau langage, une de celle qui s'évanouirait pour un rien , mais qui mise au pied du mur sait se montrer pragmatique et prendre dans l'urgence des décisions extrêmes: se débarrasser avec un art consommé de la manipulation de l'envahissant comte de Guiche,se marier, comme ça, en un quart d'heure, pour sauver la mise à Christian - même si la manoeuvre échoue. Et arriver en plein champ de bataille, amenant du ravitaillement à l'armée qui meurt littéralement de faim, en ayant fait preuve de sang-froid et d'un talent d'infiltration sans pareil, ce qui lui vaut l'admiration de tous les hommes présents. Et rien que pour ça, pour cette héroïne tout sauf gentiment douce mièvre ou soumise, chapeau bas à Edmond Rostand! 

Evidemment, avec deux personnages aussi flamboyant, le pauvre Christian paraît terne ( et en a conscience, ce qui le rend aussi sympathique dans le fond).

J'avais vu il y a très longtemps le film de JP Rappeneau, qui m'avait assez agréablement surprise ( bien que je sois loin d'être fan de Depardieu, j'avoue que ce n'était pas la catastrophe que je craignais et qu'il s'en tirait honorablement) notamment le passage du siège d'Arras, en décors naturels, la brume du petit matin ( de mémoire) tout ça, ça mettait en valeur ce IV° acte, un peu parent pauvre entre l'acte du Balcon et l'acte V, plein de panache ( oui, j'ose!)
non je n'allais quand même pas illustrer ce sujet avec Jean Vilar, quand même...
Je n'ai pas encore vu la version mythique que Claude Barma, mais comme je viens de voir que l'INA la propose en VOD ça ne saurait tarder, surtout avec une des figures mythiques du festival d'Avignon, je ne peux pas passer à côté.

De guiche est Comte, puis Duc,  Valvert est Vicomte, Christian est Baron.. en fait presque toute l'aristocratie est là
Le siège d'Arras de 1640 est un épisode tout à fait réel de la Guerre de trente ans, auquel ont participé le vériatble Cyrano et son véritable cousin par alliance, le Baron de Neuvilette. 
a e propos, j'ai vérifié les surnoms des précieuses proposés par Rostand que je trouvais à pleurer de rire:Urimédonte, Félixérie, Cassandace, Barthénoïde ( d'ailleurs je n'arrive pas à croire celui qui dans la pièce les trouve exquis, j'entends dans ma tête cette réplique avec une bonne dose de sarcasme). et si, ce sont d'authentiques surnoms de précieuses de l'époque
Non, je ne l'ai pas oublié!!
idée n°66: un nez ( bah oui!!)


dimanche 14 juillet 2013

Salomé - Oscar Wilde

C'est Juillet et chez moi, juillet , c'est la fête du théâtre, donc du 8 au 31 juillet, le théâtre va être à l'honneur ici. En plus ça fera un peu descendre la PAL qui menace de me submerger!

Du coup, les billets " théâtre" seront ornés de cette splendide photo de Jean Vilar en Richard II

Et on commence par Salomé d'Oscar Wilde, réécriture ultra célèbre  du mythe de la danseuse biblique.
La pièce est très courte et se lit vite, et en français s'il vous plait! en effet l'édition que j'ai est bilingue, mais elle a été écrite par Wilde directement en français et traduite dans sa langue natale seulement dans un second temps. Donc, VF obligatoire!

L'introduction de cette édition est très intéressant, car elle cite les principales sources de Wilde, car au final la Salomé biblique n'est évoquée que très brièvement sans même être nommée : elle y est mentionnée la fille d'Herodiade ou la fillette, et nulle précision n'est donnée sur le type de sa danse, c'est la vogue de l'orientalisme à la fin du XIX° siècle qui en a fait d'une part une adulte, et d'autre part une danseuse du ventre à moitié nue et provocante.. Dans l'imaginaire moyen-oriental de l'époque elle était peut être habillée de pied en cap après tout.Qu'il s'est plutôt inspiré de Salammbô de Flaubert pour le côté " exotisme orientalisant". Et des tableaux de Gustave Moreau.

Autre grosse différence entre la danseuse biblique et celle de Wilde: la Salomé traditionnelle n'a pas de volonté propre, pas d'instinct vraiment meurtrier, elle fait seulement ce qu'on lui demande: danser parce que le roi lui a demander, et demander la tête du prophète parce que c'est ce que sa mère lui a demander. Celle de Wilde au contraire a des idées bien arrêtées: elle a fait des avances à Jean ( ici nommé de manière plus plus orientale Iokanaan) celui-ci les a repoussées, elle s'avise donc que la seule manière de le mettre en son pouvoir est de le faire tuer. C'est vraiment sa propre décision, une décision excessive je vous le concède.
Mais tout le monde est excessif dans cette version: le capitaine syrien qui se suicide parce que Salomé ne le remarque pas, Salomé qui veut la mort de celui qui refuse de la regarder.

Le regard sur l'autre est au centre de la pièce: Hérode regarde trop Salomé, qui n'a d'yeux que pour sa future victime, le tout sous 'l"oeil" de la lune omniprésente. Bon, évidemment, il faut accepter la convention théâtrale classique, assez artificielle, que tout se passe en l'espace de quelques heures, d'une heure même, vu la brièveté de la pièce. Par conséquent, tout est un peu précipité et la psychologie des personnages s'en ressent, ils auraient gagné à être fouillé, mais restent ici au niveau de l'archétype, chacun vissé à sa monomanie: Iokanaan ne fait rien d'autre que divaguer et maudire (soit, il est enfermé depuis longtemps dans une citerne, ça peut affecter le comportement), Hérode ne fait que craindre que ces malédictions attirent le malheur sur lui, mais ne peut se résoudre à se débarrasser de Iokanaan de crainte de s'attirer le mauvais oeil. Salomé ne sait que provoquer et harceler le prisonnier. Et Hérodiade est persuadée que tout ce qui est dit de mal la concerne.Un monomaniaque, une paranoïaque, une sadique et un peureux chronique, belle brochette de cas pathologiques!

En fait, L'intérêt de la pièce est plutôt d'être une suite de tableaux, exactement picturaux. Les illustrations d'Aubrey Beardsley sont d'ailleurs devenues ultra célèbres, mais on apprend en appendice que Wilde ne les aimait pas: trop caricaturales.. sur ce point je suis assez d'accord avec lui. En fait, c'est plutôt les dorures des deux Judith ( l'autre coupeuse de tête, parfois difficile à distinguer de Salomé sur les représentations) de Klimt que j'ai en tête.

Là c'est Judith ( la légende est directement sur le tableau), mais elle correspond assez bien à la Salomé de Wilde. Il n'a pas connu le tableau, peint en 1901 , puisqu'il est mort un an plus tôt, mais je pense qu'il aurait apprécié cet air cynique et ces dorures.

et quand je dis qu'il est compliqué de les différencier: Salomé et Judith par Cranach l'ancien
Seuls leurs attributs peut les identifier: le plateau pour Salomé, l'épée pour Judith.
Aparté: L'an dernier il y avait à Montpellier une très intéressante exposition sur Caravage et son influence, qui mettait en rapport les 3 personnages bibliques coupeurs de tête, Salomé, Judith et David. Ou cette problématique de la différenciation était mise en avant: les 3 têtes coupées n'ont pas la même valeur, d'un point de vue mythique ( acte de bravoure pour David et Judith, et acte honteux pour Salomé, même si elle n'est que l'instrument d'Hérodiade, vraie instigatrice du meurtre), et que ça devient parfois très subtil chez quelqu'un qui brouillait volontiers les pistes comme le Caravage.

Enfin, sans être inoubliable, c'est une lecture intéressante, en ce qu'elle fait de Salomé une héroïne agissante, et agissante pour son propre compte, dangereuse, mais moderne et qui revendique sa volonté. Et ça, fin XIX°, ça n'était pas monnaie courante au théâtre.
Même si la pièce est écrite en français, Wilde est un auteur Irlandais et donc,entre dans le défi commonwealth!
Réécriture d'un mythe célèbre
Hérode est tétrarque, Hérodias et Salomé sont princesses,
Hérode Antipas et Hérodiade sont attestés historiquement , donc ça marche!
idée 57: une tête ( oui, en haut dans le plateau, coupée bien sûr)

interstella 5555 - Leiji Matsumoto & Daft Punk

Et la Geekerie du jour est un clin d'oeil: comme il était question ces jours -ci du nouvel album du duo électro Daft Punk ( nouvel album que je n'ai pas écouté, j'ai eu de bons et de mauvais échos, donc, je me ferai mon idée à l'occasion quand on me le prêtera), j'ai eu envie de ressortir Interstella 5555, qui date de 2003, donc tout pile 10 ans.

Ce film est difficile à classer: film d'animation agrémenté de morceaux tirés de l'album Discovery, c'est en quelque sorte un maxi-clip de plus d'une heure. Mais il développe aussi une narration et des thèmes qui ne sont a priori pas contenus dans les "chansons" de Discovery. Donc, je viens de le revoir, et j'ai envie de dire qu'il est malgré tout un peu plus qu'un long clip.

Oui, il y avait des ET bleus bien avant que James Cameron ne s'en mêle
Tout est parti en fait de 4 clips animés signé Leiji Matsumoto pour 4 morceaux de l'album, qui narraient comment, sur une planète éloignée un groupe de rock extra-terrestre, composé de quatre aliens humanoïdes tout bleus était enlevé par un producteur terrien, et, après lavage de cerveau, implantation de faux souvenirs et relooking, allaient faire carrière sur Terre à leur corps défendant. Et c'était tout. Frustrant n'est-ce pas?
Et donc de fil en aiguille, les autres morceaux ont été adaptés, afin de compléter l'histoire: un cinquième extra-terrestre, fan absolu de la jolie bassiste du groupe, est envoyé à leur recherche sur Terre, afin de les libérer et de ramener sur leur planète d'origine. Et là il y a des choses intéressantes: le 5555 du titre signifie " the 5ecret 5tory of 5tar 5system, un "star système pour le coup pris au pied de la lettre!
après relooking.. évidemment, un lavage de cerveau ça laisse des traces
 Une critique quand même assez directe de l'industrie musicale, qui invente de A à Z une biographie à nos 4 héros, un nom et un logo (qui parodie une célèbre marque de soda marronnasse) pour le groupe, en font un produit de grande consommation...et bien sur les Aliens, coquilles vidées de leurs souvenirs et de leurs émotions, "zombifiés", pressurés, trainés de sessions d'enregistrement en galas, sont une charge contre l'exploitation mercantile des artistes.

Certes l'équation "artiste talentueux = énergumène débarqué d'une autre planète" n'est pas nouvelle... hum.. David Bowie?

Mais voila, ce projet un peu fou d'un film d'animation sans paroles, sur de la musique électro, ce "clip-concept" comme il y a eu des albums-concept dans les seventies, j'accroche bien.

Parce que déjà, j'adore le graphisme très personnel de Matsumoto ( Génération années 80, j'ai suivi avec passion les aventures d'Albator à l'époque). Parce que c'est joliment animé par la TOEI, en numérique, mais pas en 3D ou en images de synthèse, et ça c'est un gros point positif!
Et puis il y a des clins d'oeil tout du long: un plan qui rappelle le Monolithe de 2001 Odyssée de l'espace, le batteur du groupe en fuite qui porte le manteau d'Albator ( et d'ailleurs il ressemble comme un jumeau à Toshiro / Alfred, de même qu'on voit apparaître de-ci de-là des têtes connues, croisés dans Gun Frontier ou dans l'équipage de l'Atlantis). Et puis c'est sympa de faire du petit bonhomme au physique ingrat le personnage principal de l'histoire.
Y'a comme un air de famille avec les héros de Gun Frontier, non?
Des références à Space Battleship Yamato, un autre anime de Matsumoto  moins connu chez nous
leurs têtes ne me sont pas inconnues :)

Parce que , même si j'aime bien l'électro un petit moment, écouter un album entier, ça n'est pas mon truc, mais qu'en musique d'accompagnement, ça passe très bien, et comme l'animation illustre les morceaux, elle cadre souvent très bien avec la musique ( le clip de Harder, better, faster, stronger illustré par le grimage " à la chaine" des extra terrestre cadre bien avec le côté industriel de morceau), donc , à part d'être 100% rétif à l'électro, je pense que pour ceux qui aiment moyennement, mais accrochent malgré tout à l'ambiance sci-fi et au graphisme Matsumoto, c'est une bonne porte d'entrée vers le groupe. Et inversement pour ceux qui adorent l'électro mais connaissent peu la japanimation. Je pense d'ailleurs que beaucoup de gens ont découvert le groupe via  cette animation.

Après pour l'animation elle même, elle est fluide, avec un effet volontiers vaporeux, des couleurs vives, très agréable à voir et surtout, ça n'est pas de la mauvaise 3D en images de synthèse. Et accessoirement mais pas tellement, j'aime beaucoup la tenue de gala turquoise que porte Stella
Apparemment je ne suis pas la seule, vu le nombre d'images de cosplay que j'ai trouvées!
Et bien sur place à la musique: One more time, le tout premier extrait, qui présente les personnages et leur enlevement.
Et Harder better faster stronger ( 4° séquence de l'animation, le relooking des ET). Je dirais qu'en plus d'être les deux morceaux les plus connus de l'album, ce sont aussi les plus parlants de l'animation à mon avis. Et Harder est peut être mon favori, une vraie réussite, tant l'animation et le morceau collent bien l'un à l'autre.

En tout cas j'ai vraiment pris grand plaisir à le revoir.. mais il y aura encore de la japanimation ici, et de la SF, vous n'y couperez pas!
Japanimation+SF+ musique electro= combo gagnant!