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jeudi 7 mars 2013

Oedipe roi - Sophocle

Comme j'étais malade ces temps ci, et obligée de rester couchée... en état de lire, mais couchée, j'ai pu me féliciter d'avoir mis quelques e-books sur ma tablette. Et j'ai eu envie de me replonger un peu dans le théâtre grec. Oui, je sais vous vous dite " elle est maso, elle a une bronchite, elle est au lit, et elle lit de la tragédie grecque". Mais oui.. avec l'avantage que le théâtre grec est assez court et se lit vite.
On le trouve là, dans une foule de format, gratuitement et sans DRM

Oedipe roi, je l'avais déjà pourtant lu deux fois, en terminale pour le cours de littérature, et en fac ( littérature comparée sur le sujet "mythe d'oedipe " .. je crois me souvenir qu'il y avait aussi  au menu de ce cours celui de Sénèque, une version par Corneille qui ne m'a pas laissé trop de souvenir, et "les gommes" de Robbe Grillet, dont je n'ai toujours pas trouvé quel peut bien être le rapport avec Oedipe.
J'avais trouvé cette pièce très intéressante, surtout vue par le prof de terminale, et je l'ai même encore plus appréciée à la 3° lecture.
Donc l'histoire d'Oedipe. La version de sophocle ( IV° siècle avant notre ère) est probablement la plus connue, mais il s'agit d'une version parmi d'autre d'un récit plus ancien ( l'Oedipodie, attribuée à Kinaithon de Sparte aux alentours du VII° siècle avant notre ère, par exemple) . Pour le spectateur grec de l'époque classique, le mythe est déjà connu, avec quelques variantes, mais pas besoin de présenter les personnages, sophocle peut se permettre d'entrer directement dans le vif du sujet.

l'acteur Mounet-Sully dans le rôle d'Oedipe ( 1881) .. j'adore ces anciennes photos.


 La ville de Thèbes en Béotie, est ravagée par la peste et la famine , et les citoyens, via le choeur, demandent au roi Oedipe d'agir. Oedipe envoie donc Créon, son beau-frère, prendre conseil de l'oracle d'Apollon  à Delphes, et la réponse du dieu est la suivante: le précédent roi, Laios, a été tué, le crime n'a pas été vengé, il faut donc retrouver le meurtrier et le bannir de la cité afin de rétablir l'ordre des choses. Le roi Oedipe va donc véritablement mener l'enquête pour éclaircir un meurtre vieux de plusieurs années. Et c'est là, ce que je trouve le plus marquant: on est probablement devant le plus ancien prototype d'histoire... policière. Tout y est: enquête, recherche des témoins, interrogatoires, contre-interrogatoires, confrontation de témoins.. la mécanique complète de la pièce policière est déjà là. Peu à peu, les preuves semblent se diriger vers Oedipe lui même, qui a fui son pays pour éviter la réalisation d'un épouvantable destin, celui de tuer son père et d'épouser sa mère. Ce qu'il ne sait pas , c'est que les parents qu'il a quittés sont en fait ses parents adoptifs ( hop, retournement de situations), et que, disons une trentaine d'année plus tôt, le même oracle avait été fait au feu roi Laios, qui pour éviter le destin lui aussi, a fait abandonner son fils dans la montagne.. sans savoir qu'un berger qui passait par là le sauverait, et le donnerait au roi du pays voisin en mal d'héritier. Et que quelques années plus tard, une bagarre idiote sur un bord de route entre deux hommes qui sont père et fils sans se connaître aboutirait à la réalisation de l'oracle. Sauf que la ville privée de son roi était alors en proie à une autre calamité, la sphinx ( oui, LA sphinx), ce qui explique que l'enquête n'ai pas été menée en temps utile.
 Et Oedipe, ayant réussi à vaincre le monstre, avait alors gagné le statut de citoyen d'honneur de la ville, puis en épousant la veuve du roi, le titre de roi. Un simple enchaînement de circonstances improbables, en somme, dont le but est de prouver qu'on n'échappe pas au destin que les dieux vous assignent. Mais voilà, Oedipe a tué son père, sans le savoir, et épousé sa mère, sans le savoir - je suppose que Jocaste avait été veuve jeune, et qu'elle ne doit pas avoir plus de 15 ans d'écart avec son second mari, en tout cas, leur écart d'âge n'a pas l'air de choquer vraiment - et doit donc s'appliquer sa propre sentence de bannissement. Car son vrai crime, c'est l'Hybris, l'orgueil démesuré d'avoir pensé échapper au destin. Vouloir aller à l'encontre de ce destin, c'est s'opposer aux dieux, et donc encourir leur vengeance ( et c'est ce qui arrive aussi dans l'Illiade: par orgueil Agamemnon prive Achille de sa part de butin, et la guerre s'enlise)

Amphore à figures rouge, à peu près contemporaine de la pièce de Sophocle
Je pense qu'il est intéressant de la lire en oubliant les concepts psychologiques du XX° siècle. Car l'Oedipe de l'histoire est horrifié par ce qu'il apprend, il n'a pas de pulsions meurtrières face à son père, ni malsaines envers sa mère et, au contraire, a fui son pays pour éviter de voir l'oracle se réaliser, sans savoir qu'il était un enfant adoptif. Le coup du complexe est un peu tiré par les cheveux, donc. Résumer le mythe à ces simples faits de pulsions meurtrières et sexuelle est par trop réducteur, car on perd toute la dimension culturelle et probablement sociale qu'elle devait avoir à l'époque ( ne soit pas orgueilleux, n'essaye pas d'en vouloir plus que ta part, sinon, il t'arrivera malheur.. sinon par les dieux, du moins par la justice des hommes)

Il va falloir que j'aille emprunter à la médiathèque " Oedipe et ses mythes" de JP Vernant et P Vidal Naquet, pour voir ce qu'ils en disent.
En tout cas, moi, le théâtre grec ( et la culture grecque classique en général), j'aime beaucoup.. et je lirais donc la suite, Oedipe à Colone , Antigone, les sept contre Thèbes ( Eschyle), et du plus léger aussi ( même que , tiens, Lysistrata sera parfaite pour la journée des femmes!)
Une lecture pour le challenge mythologie de Myrtille

Et pour le challenge royal de Liliba
 Je m'aperçois que je n'ai pas encore parlé ce de défi là: Donc Liliba organise un défi lecture royal dont les modalités sont ici ( disponible en 2 versions: soit des livres qui mentionnent un titre de noblesse dans leurs titres, soit des livres qui parlent de rois/ reines/chevaliers/ etc.. Et , justement Oedipe Roi rentre dans les 2 catégories ;) )
8/25

5 commentaires:

  1. J'aime beaucoup ton analyse de la pièce. Comme tu dis, le complexe d'Oedipe n'est qu'un point de vue sur ce mythe, une interprétation, psychanalytique, parmi d'autres. Ravie de voir que tu apprécies la tragédie grecque, pour ma part, il faudrait que je m'y remette car je n'en ai pas beaucoup lu depuis la fin de mes études ! Merci de ta participation :)

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  2. C'est une de mes pièces de théâtre préférées. Le désespoir d'Oedipe, et de Jocaste me touchent à 2500 ans d'écart...

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  3. Le mythe d'Oedipe m'avait marquée quand j'étais plus jeune, je crois même que c'est l'un de mes préférés avec celui d'Orphée...
    Les Grecs avaient le sens de la fatalité ! Ah cette fameuse hybris (oui, je l'écris au féminin, car pour les Grecs, tout ce qui est négatif est féminin, non ?^^)

    En tout cas, l'acteur de la photo a vraiment du stÿle... :)

    J'ai lu Lysistrata il y a peu et j'ai A-DO-RE !! j'ai littéralement pleuré de rire à la lecture... Il est fou, cet Aristophane... ;)

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  4. Bonjour,

    De passage sur votre site, je puise quelques idées de lecture à venir et vous remercie pour le temps que vous prenez afin de faire découvrir de nouveaux livres, ou auteurs, à autrui.
    J'en profite pour vous conforter dans votre idée d'aller emprunter Œdipe et ses mythes que vous citez en bas de page. Trop rares sont les personnes à n'être pas aveuglées par les stupidités freudiennes et qui savent lire ou présumer de la dimension réelle de cette œuvre de Sophocle.
    Par ailleurs, les tragédies de Sophocle méritent vraiment d'être lues ou relues débarrassées des guenilles qu'un XXème siècle en mal de repères et terrifié à l'idée que les choses puissent être et ne représentent certainement rien lui a fichu sur la carcasse.

    Œdipe Roi et Antigone, rescapés, sont sans doute les meilleures portes d'entrée dans la tragédie de cet auteur.


    Bonnes lectures à vous, et bonne suite.

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    1. Et bien merci de ce long et sympathique commentaire, qui me conforte dans l'idée de continuer à approfondir mes sujets, même si la longueur de mes articles peuvent dissuader les lecteurs pressés. Sur le fait ne ne pas se laisser imposer une lecture psychanalytique, j'ai beaucoup apprécié "Pandora" de JP Vernant, qui renvoie les "interprètes" en touche.

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